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Un déplacement relativement léger
Ce type de détail, nous le passerons précisément en revue dans le prochain numéro. mais d'ores et déjà, l'évocation de ces quelques réflexions rappelle une évidence difficilement contournable : la sécurité et l'autonomie dans un bateau de voyage font rapidement rentrer l'architecte dans une spirale du poids qui même logiquement au déplacement moyen ou lourd. On ne peut pas à la fois exiger une coque indestructible, un moteur surpuissant, une charge utile importante, des aménagements confortables et volumineux, une excellente isolation et revendiquer en même temps une carène dessinée pour un déplacement léger. Alors Jean Berret annonce un déplacement Lège de 12 tonnes et un poids en charge de 15 tonnes, on se demande un peu où sont passés les kilos. Et portant, regardez les formes de Périple 50 : 68 cm seulement de creux de coques, 38 m2 de surface mouillée pour un bau de 4,88m au pot et 3,65 m à la flottaison. Des formes en U assez tendues... Tout cela paraît bien en accord avec les chiffres de déplacement annoncés, "Le poids, par rapport aux autres bateaux de voyage, et en particulier aux autres dériveurs intégraux, c'est dans le lest que nous avons gagné !" Ce n'est pas de la provocation mais le résultat logique d'un choix d'appendices original : deux dérives sabres lestées et relevables pour s'escamoter complètement dans des puits qui ouvrent sur le pont. Chacune descend le tirant maximum en navigation à 3,60 m ! Elles portent 1,4 tonnes de lest en plomb dans la partie basse, ce qui permet d'abaisser considérablement le centre de gravité. Pourquoi deux plutôt qu'une, me direz-vous : suite au prochain numéro !
On navigue en haute mer avec les deux dérives baissées qui garantissent une stabilité suffisante et on bénéficie d'une position d'approche à 2,20 m avant de passer à la position intégralement relevée. Trois positions donc, adaptées chacune aux spécifités de ces navigations extrêmes. Comme le pourcentage de lest dans le bateau n'est que de 22%, l'inertie supplémentaire et la capacité à porter de la toile sont obtenues par l'adjonction de ballast de 1500 litres chacun, compartimentés pour être remplis d'eau douce et d'eau de mer ( nous vous en dirons d'avantage le mois prochain). Avec 125 mètres carrés de voilure au près, l'ensemble ne devrait pas se faire prier pour avancer et offrir à l'équipage des moyennes journalières confortables. Au vu de ces chiffres, on comprend qu'une des volontés qui a animé les concepteurs du projet, est de montrer qu'on peut réaliser un bateau de voyage avec toute les contraintes de charge, de solidité et de sécurité qu'il impose, sans pour autant faire l'impasse sur les performances ou le plaisir à naviguer. C'est suffisamment rare pour mériter un coup de chapeau.
Les voies entreprises sont toutes originales par rapport aux conceptions traditionnelles du voyage mais assez balisées pour ne pas effrayer l'amateur de modernisme. EN voici quelques illustrations :
- le mât tournant : cette configuration est désormais validée à partir du moment où l'on sait la traiter avec sagesse. Ici, le surcroît de rendement offert permet de limiter le tirant d'air, ce qui est toujours appréciable sur un bateau destiné à naviguer ou rester stationné dans beaucoup de vent.
- le système de refroidissement par keel-cooling : il offre lui aussi bien des avantages - celui par exemple de pouvoir faire tourner son moteur alors qu'on est échoué ou dans des eaux très sales et de servir en même temps au chauffage du bord.
- l'annexe arrière intégrée dans la jupe est un kit qui va de la petite biplace en alu à la semi-rigide de haute mer par adjonction d'une seconde coquille et d'un boudin.
- le système de bi-safran relevable permet non seulement de protéger la mèche cas de choc frontal, mais aussi de démonter une des pelles pour la réparer à bord si nécessaire sans avoir à se mettre à l'eau...
La liste serait trop longue pour vous faire aborder toutes les questions que ce projet pose et toutes les solutions qu'il apporte. Elles sont le fruit de plus d'un an de travail à plein temps et donnent aujourd'hui la sensation d'un produit très abouti.
Pour valider ces choix, Jacques Peignon entreprendra un galop d'essai de six mois vers le sud pendant l'hiver. En attendant les premiers essais, nous invitons à un bilan technique de détail de cette unité hors normes.
Pierre-Marie Bourguinat
Loisirs Nautiques numéro 308 - Aout 1997
Texte reproduit avec l'aimable autorisation de la revue Loisirs Nautiques
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