10 mars 2004

Approche de St Paul

Journal de Bord

Alors que nous remontons doucement vers St Paul, le soleil refait timidement son apparition, laissant glisser sur les hublots ses rayons chauds et réconfortants. Après toute cette grisaille, après les mers fortes, les courses contre le temps perdu et la déception de renoncer à la Terre Adélie, ce petit bout de lumière vaut toutes les vitamines du monde.


Je suis étrangement bien si je ne fait pas cas de ce petit peu d’amertume qui me reste et que je m’applique à noyer dans la contemplation d’un jour bleu marin. Un petit effort et hop le sourire est là. Il faut parfois se forcer un peu car le bonheur n’est pas un dû et il faut aller le chercher où il se trouve.
La mer m’a mis en face de moi-même, me forçant à quelques réflexions dont je ne m’étais jusqu’à présent pas sentis capable. Dans sa houle infinie la mer m’a offerte une nouvelle échelle de valeurs et me fait voir dans notre relatif dépouillement les choses auxquelles je tenais vraiment. Elle m’a enrichi plus par les questions qu’elle a suscité que par les réponses qu’elle m’a donné, mais c’est là le commencement obligé de toutes choses.

Mes rêves de glace et d’Antarctique ont disparu et d’autres voyages ou d’innombrables expériences restent à vivre mais il faut apprendre tout d’abord du présent et tirer les bonnes leçons de cette expérience. « Seul les échecs bien supportés donnent le droit de réussir ». Chacun fait sa route et ne la fait que pour soi, apprenant ce qu’il peut. Tout est à construire sans cesse. Mais je m’interroge sur cet étrange phénomène qui nous pousse à aller toujours plus loin, à flirter toujours plus avec le danger et à courir sans cesse derrière nos envies folles.
Tout cela donne t’il plus de valeur à l’objet de nos désirs ? Serions nous incapable du même plaisir, des mêmes satisfactions dans la contemplation de notre quotidien ? Je ne le crois pas sinon le bonheur resterait une chimère, quelque chose d’abstrait et fuyant et tout aujourd’hui nous prouve le contraire. Tant mieux.

Demain nous débarqueront à St Paul pour y goûter un peu le calme et le charme d’une île déserte. Il y a quelques années j’y étais passé au retour d’hivernage et Claude Chauffrias, Tonton et les autres nous avaient offert une merveilleuse escale très animée . J’y étais revenu deux ans plus tard pour y guider quelques touristes et St Paul nous avait offert un tout autre visage, toujours aussi séduisant pourtant.

Qu’en sera t’il cette fois-ci ? Voilà le mystère et le charme qui nous attendent. A bientôt,

Pierre Emmanuel

Posted by didier at 03:14 PM